09/05/2014
Parce qu’au delà de la simple réalisation de reportages, la rédaction de Luxury Must Hospitality aime créer des évènements qui font se rencontrer des personnalités emblématiques de l’Hôtellerie de luxe, de la haute Gastronomie ou du Tourisme, nous avons réuni deux figures de la Gastronomie internationale pour un moment d‘échange et de partage exceptionnel. Une rencontre autour du thème du Produit entre Pierre Marcolini, passé maître dans l’art de la haute chocolaterie, et Fulvio Pierangelini, le très charismatique Chef étoilé italien, aujourd’hui consultant culinaire du groupe Rocco Forte.
Une discussion authentique et haute en couleur, entre deux vieux amis, qui s’est tenue dans le magnifique décor de la suite royale de l’hôtel Amigo à Bruxelles.
L’occasion de rendre au Produit toutes ses lettres de noblesse quelques jours avant l’ouverture du salon Culinaria qui se tiendra à Bruxelles du 21 au 25 mai prochains. Un événement dont la vocation initiale était de sortir les Chefs étoilés de leur restaurant pour les faire cuisiner dans un lieu éphémère au cœur de Bruxelles et qui promet cette année encore de mémorables moments gastronomiques sur le thème «Festin originel».
La discussion, très animée entre les deux compères s’est très vite orientée sur l’importance de maîtriser le Produit depuis le début de la chaîne. C’est à dire d’aller sur le terrain afin de trouver les bons producteurs et d’être sûr de la manière dont ils nourrissent leurs animaux, dont ils cultivent leurs légumes ou de l’endroit où ils pêchent leurs poissons. Pierre Marcolini nous résume d’ailleurs la philosophie de sa maison en ces termes : « Il faut avant tout entretenir des relations de confiance avec les producteurs, dans un esprit de respect mutuel. Nous respectons nos employés dans nos ateliers, nous les aidons à grandir et c’est la même chose avec les planteurs, nous devons revenir à quelque chose de basique : la Confiance ».
Le producteur est la personne la plus vitale pour nous autres créateurs, il y a un profond respect entre nous, il n’y a pas de rapport de force.
Pierre Marcolini
Tous deux s’accordent très vite sur le fait que le Produit est Roi et doit être travaillé brut, sans lui ajouter de produits chimiques. Pierre Marcolini raconte volontiers qu’il a puisé une partie de son inspiration chez Bernachon à Lyon. C’est en effet là qu’il a pris conscience que la transformation de la fève de cacao est l’essence même du métier de chocolatier et qu’il a compris la différence entre fabriquer son chocolat et travailler son chocolat ! C’est ainsi que depuis une dizaine d’années il part à la rencontre des producteurs de fèves de cacao, notamment au Brésil, afin de toujours offrir le meilleur à ses clients.
Dire que l’on a mangé un chocolat exceptionnel car il avait 80% de cacao est un non sens, c’est comme dire que l’on a bu un bon vin qui titrait à 12° d’alcool ! Cela ne veut rien dire, ce qui compte, c’est la qualité de la fève de cacao et rien d’autre !
Pierre Marcolini
Fulvio, de son côté, aime à répéter qu’il cherche toujours à aller au bout du Produit, dans le respect de ce Produit. Et quand il explique qu’il caresse ses tomates, ce n’est pas du folklore, nous l’avons vu faire tant au marché qu’en cuisine ! Selon Fulvio, la façon de couper un produit comme la tomate est également primordiale et fait toute la différence pour la saveur du plat. « Afin de ne pas blesser la tomate, le découpage doit se faire exclusivement à la main et ensuite on doit laisser cuire la sauce sans la toucher!».
Je déteste toutes les possibilités chimiques de travailler sur le produit.
Fulvio Pierangelini
Et quand on lui demande quel est selon lui le meilleur produit, il nous répond que c’est bien sûr celui de saison mais qu’on ne peut pas définir un bon produit comme ça, sans être allé sur le terrain. Avant d’entrer en cuisine, le Chef a en effet traversé la Sicile à la rencontre des bergers aux mains rugueuses, des petits producteurs des terres reculées, il a passé des heures en compagnie des pêcheurs au visage buriné par le soleil et le sel de l’océan ou des femmes des villages reculés qui vont chercher les herbes sauvages. Cela lui a permis d’apprendre à choisir le bon produit et à le cuisiner de la manière la plus authentique possible.
Le meilleur produit, on le trouve en le voyant, on se regarde et on se choisit !
Fulvio Pierangelini
Et le mot de la fin sera lancé par Pierre qui nous livre sa très belle définition de la cuisine : « La Cuisine, c’est une espèce de générosité, on s’installe, et la personne vous fait plaisir, il doit y avoir une communion avec les produits ». Une phrase qui résume à elle seule la teneur de cet entretien qui fait la part belle aux vraies valeurs, celles de partage et de plaisir. Et Fulvio d’ajouter : « Au bout d’un moment, tu dépasses le produit et tu pars sur le terroir. Quand on déguste un mets, en fermant les yeux, on doit sentir le terroir, on doit sentir la fleur de thym, on doit imaginer les lapins qui courent dans la garrigue !! ».
Ce que Pierre dit de Fulvio : « C’est un esthète, il a dévoué sa carrière au produit »
Ce que Fulvio dit de Pierre : « C’est un grand professionnel, avec le temps, il a ressenti la nécessité de se recentrer sur le Produit, la matière première, la vérité. Aujourd’hui il ne peut plus en faire abstraction, je l’adore !! »